Discours d'introduction - Colloque Sénat - 23 février 2016

Le mardi 23 février 2016, j'organisais au sein de l'hémicycle du Sénat une journée de réflexion sur les articulations entre la Constitution, garante du respect des droits fondamentaux, et les dispositions en matière de droits personnels. Retrouvez l'intégralité de mon discours prononcé en ouverture du colloque.

 

Le débat que nous allons mener aujourd'hui au Sénat concerne l'un des fondements de notre État de droit démocratique. Il s’inscrit dans une profonde réflexion sur la manière dont nous vivons les uns avec les autres.


L'État de droit est l’héritage du Siècle des Lumières. Il a pu se développer au moment même où l’on a refusé d’accorder une légitimation religieuse à l'autorité de l'État. De ce fait, la laïcité est une caractéristique essentielle de l'État de droit.


Het woordenboek Van Dale definieert laïciteit als « de volledige onttrekking van staatszaken aan de invloed van de godsdienst ». In het Nederlands is het echter meer gebruikelijk om te spreken van de scheiding van kerk en staat, een term die de wederkerigheid van het principe duidelijk maakt: de kerk blijft ook gevrijwaard van de bemoeienis van de staat.


Le Petit Robert
met également l'accent sur cette réciprocité en définissant la « laïcité » comme le « principe de séparation de la société civile et de la société religieuse, l'État n'exerçant aucun pouvoir religieux et les Églises aucun pouvoir politique ».


De mensenrechtelijke vertaling van het principe van de laïciteit is de godsdienstvrijheid of de vrijheid van levensbeschouwing van de burger. De staatsneutraliteit en de vrijheid van levensbeschouwing kunnen dan ook worden beschouwd als twee kanten van dezelfde medaille. De levensbeschouwelijke onpartijdigheid van de overheid heeft precies tot doel de diversiteit aan levensbeschouwingen in de samenleving mogelijk te maken en te beschermen. Geen rechtstaat zonder pluralisme.


Dans notre société largement sécularisée, on aurait pu croire que les grands débats idéologiques sur l'application concrète de ces principes étaient définitivement relégués aux oubliettes. Mais la présence et la visibilité fortement accrues de l'islam en Europe occidentale ont remis le thème de la neutralité à l'agenda. Ces évolutions sociétales récentes nous ont, du même coup, oté nos illusions sur l'existence d'un consensus intellectuel sur la question.


Le retour de la religion dans l'espace public pose une question primordiale. Notre pays n'aurait-il pas intérêt à confirmer officiellement la séparation de l'Église et de l'État ? A l'exemple de la France, la Belgique doit-elle inscrire dans sa Constitution une disposition consacrant expressément la neutralité philosophique des pouvoirs publics ?


Le débat sur la neutralité ne resurgit pas seulement dans l'hémicycle parlementaire, dans les salles d'audience ou dans les auditoires universitaires. Il peut aussi refaire surface, par exemple, au cours d'une réunion d'association de parents appelée à décider du type de hot-dogs à proposer aux élèves à la fête scolaire : halal, non halal ou les deux ?


In de discussie zullen zowel de voor- als de tegenstanders van de voorgestelde beslissing zich beroepen op de hier vandaag besproken principes. Naar gelang van het kamp waarin de spreker zich bevindt, wordt het voorstel dan verdedigd als een toepassing van, of bestreden als een inbreuk op die principes. Zoals bij elk grondrechtenvraagstuk ligt de kern van de discussie op het snijpunt van twee vrijheden. In dit geval, aan de ene kant, de vrijheid om de eigen levensbeschouwing in de praktijk te kunnen brengen en, aan de andere kant,  de vrijheid om in de publieke ruimte gevrijwaard te blijven van de regels en praktijken van een levensbeschouwing die men zelf niet belijdt. Twee vrijheden of wellicht nauwkeuriger, zoals ik daarnet heb betoogd, de twee verschillende kanten van dezelfde onpartijdigheidsmedaille.

 

Nous aurons l'occasion d'entendre, cet après-midi, plusieurs autorités incontestées en la matière. Sans vouloir leur bruler la politesse, je voudrais évoquer ici brièvement un arrêt tout récent de la Cour européenne des droits de l'homme. Dans l'affaire Ebrahimian contre la France, la cour a été amenée à se prononcer sur la plainte déposée par une femme musulmane. Son contrat d'assistante sociale dans un hôpital public n'avait pas été prolongé parce qu'elle refusait d'enlever son voile sur son lieu de travail. 


La cour a jugé que la législation française, interdisant le port de signes convictionnels dans l'ensemble du secteur public en vertu de la laïcité, était compatible avec la liberté religieuse de la requérante, garantie par la Convention européenne des droits de l'homme. La liberté de religion de l'agent des services publics peut être limitée sur la base de l'obligation de neutralité, en vue de sauvegarder les droits et les libertés d'autrui. Ici, en l'occurrence, des patients qui s'étaient plaints du fait que l'intéressée portait le voile. S'il s'avère impossible de concilier les convictions religieuses de l'intéressée avec son obligation, l'État n'outrepasse pas sa marge d'appréciation en donnant la priorité à l'exigence d'un État neutre et impartial.

 

Ne me demandez pas de me prononcer aujourd'hui, en tant que présidente de cette Assemblée qui organise ce colloque, en faveur ou non de ce jugement.

In deze rol wil ook ik de onpartijdigheid betrachten. Maar als politici zullen wij wél vrijheden tegen elkaar moeten afwegen en keuzes maken, in onze gemeenten, in onze gemeenschapsparlementen en in deze Senaat.


In de zaak Ebrahimian stelde het Europees Hof voor de Rechten van de Mens zich terughoudend op bij de beoordeling van een diepgewortelde Franse constitutionele traditie. Elk land heeft zijn eigen traditie met betrekking tot de rol die levensbeschouwelijke overtuigingen kunnen spelen bij de inrichting van de samenleving.


En Belgique, nous devons même tenir compte des différences entre les Communautés dans ce domaine. Les sensibilités qui découlent de ces traditions peuvent expliquer pourquoi un fonctionnaire, en contact avec le public à un guichet, a parfois des droits et des devoirs différents selon qu'il se trouve d'un côté ou de l'autre de la frontière linguistique.  


Au Sénat, lieu de rencontre et de dialogue entre les entités fédérées, nous pouvons réfléchir ensemble à la meilleure façon d'atteindre notre but commun : la sauvegarde d’une société ouverte, tolérante et pluraliste. Je suis convaincue que les points de vue qui seront exposés lors de ce colloque seront très précieux à cet égard.

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